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Durant la présence des papes à Avignon

Durant le XIVe siècle, les Papes résident à Avignon où la présence de la cour papale favorise l'activité des Juifs, malgré une tentative de les en expulser. En effet, en 1322, Jean XXII expulse les Juifs d’Avignon et du Comtat1 qui se réfugient en Dauphiné et en Savoie. Pour parfaire l’expulsion, le pape juge utile de faire jeter à bas les synagogues de Bédarrides, Bollène, Carpentras, le Thor, Malaucène, Monteux et Pernes. Cette expulsion est de courte durée car le même pape, en 1326, lors du concile d’Avignon impose aux garçons juifs dès l’âge de quatorze ans de porter la rouelle jaune et aux filles, dès douze ans, de s’affubler d’un voile distinctif (cornalia ou cornu). Depuis 1326, les papes permettent aux Juifs de résider dans le Comtat et à Avignon sans être inquiétés et, ainsi, à de nombreux Juifs de France d’échapper aux persécutions dont ils sont victimes. De plus, Clément VI protège les Juifs lors des massacres liés à l'épidémie de peste noire. En 1394, les Juifs sont définitivement expulsés du royaume de France. Dans le Comtat Venaissin, les Juifs peuvent continuer à résider sous certaines conditions : port d'un chapeau de couleur jaune, paiement de taxes supplémentaires, obligation d'assister périodiquement à des prêches les appelant à la conversion, etc. Leur sort, au début de l'administration du Saint-Siège, est tout à fait comparable à celui des autres Juifs provençaux. Par exemple, comme ailleurs en Provence, de nombreux médecins sont juifs : à Avignon, en 1374, il y a six médecins juifs qui, de par le concile de 1341, voient leurs émoluments bien inférieurs à ceux des médecins chrétiens. Le quartier juif d'Avignon ne couvre pas plus d'un hectare et abrite cependant 1 000 personnes en 1358. Durant la période où les papes résident à Avignon, le commerce juif reste florissant à Avignon. Les commerçants juifs approvisionnent la cour papale en vivres, en draps, en chevaux, en parfum, en bijoux de corail et en perle pour les chapelets. Même le tailleur de Grégoire XI est un Juif. En 1374, 87 des 94 marchands de tissus de la ville sont juifs. Il y a aussi quelques prêteurs d'argent. Les carrières En 1492, les Juifs sont expulsés d'Espagne mais le pape Alexandre VI leur interdit l'accès d'Avignon et du Comtat. Puis, au début du XVIe siècle, les Juifs sont expulsés de Provence et, cette fois-ci, nombre d'entre eux, particulièrement ceux d'Arles et de Tarascon peuvent se réfugier au Comtat. Une douzaine de villes et de bourgs abritent alors une communauté juive. Si l'expulsion des Juifs des États pontificaux en 1569 n'est que partiellement appliquée, ils sont obligés, à partir de la fin du XVIe siècle, de s'installer dans une des quatre « carrières » comtadines (« carriero » en provençal« messila » en hébreu), c'est-à-dire un quartier de quelques rues bien délimitées fermées chaque soir. Ce sont les Arba Kehilot, dites les quatre saintes communautés d’Avignon, de Carpentras, de Cavaillon et de L'Isle-sur-la-Sorgue se réfèrant aux quatre saintes communautés de Terre sainte : Jérusalem, Hébron, Safed et Tibériade. À partir du XVe siècle, les communautés juives sont administrées par des baylons (terme local dérivé de baillis) qui sont responsables de leur communauté devant les autorités et ont des attributions de police. L'impôt est perçu en fonction du patrimoine. Les activités des Juifs souffrent de diverses restrictions dans le commerce des tissus. Les Juifs du pape ne sont guère nombreux : 2 000 en tout au début du XVIe siècle, 500 environ à Avignon et Carpentras vers l'an 1600. Quant à la carrière de l'Isle-sur-la-Sorgue, elle était établie dans une impasse sur 2500 mètres carrés. Dans ces carrières, les maisons atteignaient 4 à 5 étages pour gagner un peu de place, aux dépens de la solidité : à Avignon, en 1314, une maison s'écroule sur la noce qui y était donnée en causant la mort de 23 personnes. Thomas Platter nous décrit la carrière d'Avignon en 1595 qui n'est qu'une rue fermée des 2 côtés. Il signale que la plupart des Juifs sont tailleurs, alors qu'au Moyen Âge, les professions des Juifs ne se distinguaient pas de celles des autres avignonnais. Certains étaient médecins ou même fermiers4. La synagogue est dans une sorte de cave. Les Juifs ne peuvent sortir de la carrière que le jour vêtus de vêtements particuliers, dont un chapeau jaune. À Carpentras, où la carrière était plus petite et plus peuplée qu'à Avignon, les immeubles pouvaient atteindre sept ou huit étages. La répétition au cours des âges de mesures restrictives (interdiction de pratiquer la médecine, de posséder des propriétés foncières hors leur résidence, de faire le commerce de marchandises neuves, de denrées alimentaires et de chevaux semble dire qu'elles étaient en réalité seulement partiellement appliquées. Les Juifs du Pape semblent avoir en fait eu de bonnes relations avec leurs concitoyens chrétiens. À partir de la fin du XVIIe siècle, certains sont autorisés à s'établir dans le royaume de France comme Israël Bernard de Valabrègue, interprète à la Bibliothèque Royale à Paris. Un judaïsme comtadin original se développe. Il ne se rattache ni au courant séfarade (d'origine espagnole, qui se rencontre dans les régions du bassin méditerranéen et en France dans le Sud-Ouest) ni au courant ashkénaze (de l'Alsace-Lorraine et de l'Europe centrale et orientale). Il se caractérise par une organisation très structurée des communautés, une totale endogamie, un rituel propre. Les juifs parlent le shuadit, un dialecte judéo-provençal. Les offices religieux semblent fréquentés car dans la pièce de théâtre judéo-comtadine Harcanot et Barcanot, un des sujets d'intérêt des femmes est de savoir qui a manqué l'office : S'un tan a pas manca ni minha ni arvit (si un tel n'a pas manqué la prière de min'ha (de l'après-midi) ou celle d'arvit (du soir). Toutefois, il semble que la communauté juive de l'Isle-sur-la-Sorgue ait disparu dès avant la Révolution française

L'essor

Au cours du XVIIIe siècle, la situation économique des Juifs s'améliore. Les comtadins voyagent beaucoup dans tout le Midi de la France, certains s'installent de façon semi-permanente à Nîmes, Montpellier, etc. L'usage du français se répand. En 1741 est reconstruite la synagogue de Carpentras, la plus vieille aujourd'hui en France. Si cette synagogue reste très discrète, comme celle de Cavaillon, cette prospérité nouvelle est reflétée dans la salle de prière, chef d'œuvre de décoration et de ferronnerie italianisantes. Celle de Cavaillon, qui date de 1772, est, selon Bernhard Blumenkranz, encore plus admirable. Par contre, la vie quotidienne ne peut guère refléter l'enrichissement des Juifs du Pape, qui ne sont pas autorisés à s'établir hors des « carrières » surpeuplées où les maisons de six ou sept étages apparaissent aux yeux des voyageurs qui arrivent à Carpentras comme de véritables gratte-ciel. Ce n'est qu'en 1784 qu'un cafetier de Carpentras est autorisé à recevoir des Juifs.

De la révolution à nos jours

La Révolution française, avec le rattachement à la France d'Avignon et du Comtat Venaissin, marque pour les Juifs une véritable libération. Malgré une opposition (peu virulente, d'ailleurs) de certains, les juifs du Pape deviennent citoyens français. En quelques années, les carrières se vident, malgré l'arrivée de Juifs ashkénazes. Les Juifs prennent une part active aux événements révolutionnaires, en particulier à Nîmes, et se dispersent dans toutes les grandes villes du Midi, et jusqu'à Paris. En sommeil pendant un siècle et demi, les communautés d'Avignon et de Carpentras retrouvent une nouvelle vigueur après 1962, avec l'arrivée de juifs rapatriés d'Algérie. La synagogue de Carpentras reconstruite au XVIIIe siècle sur des fondations du XIVe siècle est la plus vieille synagogue de France aujourd'hui en service.

Les grandes figures

Après l'émancipation des juifs, les descendants de ces communautés prennent une part active dans la société française et se distinguent dans de multiples domaines. En politique notamment Adolphe Crémieux (1796-1880), homme d'état octroya la nationalité française aux juifs d'Algérie (décret Crémieux), Alfred Naquet (1834-1916), député puis sénateur du Vaucluse au début de la Troisième République, légiféra sur le divorce. Dans l'art et la culture, se sont fait remarquer les écrivains Bernard Lazare (1865-1903), un des principaux défenseurs du capitaine Dreyfus, et Armand Lunel (1892-1977), le dernier locuteur du judéo-provençal et le mémorialiste du judaïsme comtadin, le compositeur Darius Milhaud (1892-1974), le chef d'orchestre Pierre Monteux (1875-1964) et l'historien Pierre Vidal-Naquet (1930-2006).

A Cavaillon, la présence d’une communauté juive est attestée par des documents d’archives dès le 13e siècle. Il est possible que cette présence ait été effective dès l’Antiquité : le musée juif comtadin conserve la lampe dite « d’Orgon » du 1er siècle, gravée d’une ménorah (chandelier à sept branches). Au Moyen-Age, cette communauté était parfaitement intégrée à la population locale, beaucoup de Juifs occupaient des fonctions importantes au sein de la ville. Toutefois, cette situation va se dégrader dès le 14e siècle. En effet, en 1307, Philippe le Bel chasse les Juifs de France ; en 1495 Charles VIII les chasse de Provence ; seul le Comtat Venaissin, terre papale, leur reste ouvert. Cette tolérance est relative car les Juifs doivent porter un signe distinctif et seront contraints, au début du 17e siècle, à habiter les carrières, équivalent provençal des ghettos italiens. C’est à Cavaillon que fut instituée la première carrière en 1453. Au centre de la cité, elle occupait une impasse qui était totalement close tous les soirs. Les Juifs ne pouvaient en sortir que durant la journée. La vie s’organisait en son sein, tout particulièrement autour de la synagogue, à la fois lieu de culte collectif, salle de réunion pour les baylons (administrateurs de la communauté) et enfin école lorsque le rabbin fait la classe…. C’est seulement à l’occasion du rattachement du Comtat Venaissin à la France en 1791 que le statut de citoyen étant accordé à tous, la communauté juive quitte la carrière, symbole de leur oppression passée.