Sara Levy - Borg

Épitaphe de la stèle n°52 de Sara Ury épouse Borg:

Ci repose une femme précieuse, dame Sourele,

épouse de Guershon, qui suivit le parfait chemin

et fit la bienfaisance toute sa vie, décédée le 9

Eloul et enterrée la veille du Saint Chabbat 621

P.C. - Q.S.A.S.R…  "Que son âme soit reliée au faisceau des vivants"

Les Juifs en lorraine

Dès le 13ème siècle, on trouve des Juifs dans notre région, à SARREGUEMINES, HAMBACH, PUTTELANGE… En 1477 éclata une guerre entre la Lorraine et la Bourgogne qui se termina par la mort du Duc de Bourgogne, CHARLES LE TÉMÉRAIRE, devant NANCY. Le Duc de Lorraine RENÉ II accusa les Juifs de connivence avec les Bourguignons et les expulsa du Duché après avoir confisqué leurs biens. L'accusation n'était guère fondée mais le Duc profita de l'occasion pour se débarrasser des Juifs devenus trop influents, jusque dans les milieux proches de sa cour. Ils se réfugièrent dans les principautés voisines. Le Seigneur de FRAUENBERG, par exemple, accueillit une colonie importante.

… Et à Rouhling

Il est probable que dès cette époque, quelques familles trouvassent asile à ROUHLING sous la protection des seigneurs du lieu ; les Comtes de SARREBRUCK-NASSAU. Il faut également admettre que la colonie décimée par la guerre de Trente Ans connût un accroissement lors du repeuplement à la fin du 17ème siècle.

Vers le milieu du 18ème siècle, ils durent payer une taxe appelée " JUDENSCHUTZ " à savoir 2 Gulden (Florins) par foyer et un droit d'enterrement de 1 ½ Gulden pour un adulte et la moitié de cette somme pour un enfant. Ces " recettes " étaient partagées entre les Barons de KERPEN et la Commanderie de l'ordre des Chevaliers Teutoniques de SARREBRUCK.

La Synagogue était placée sous la protection de cet ordre moyennant une taxe annuelle de 4 Gulden. En plus de cette somme, la communauté devait livrer un pain de sucre à la commanderie de l'ordre chaque 1er janvier.

La Synaguogue se trouvait dans la maison REES, à l'entrée d'une petite ruelle au milieu du village appelée " Eberhard's Gaessel ". Avant l'acquisition de ce bâtiment, ils durent se rendre à la synagogue de WELFERDING qui recevait également les Juifs de SARREGUEMINES jusqu'au milieu du XVIII ème siècle.

Une Situation Peu Enviable

Nous ne savons pas grand chose des Juifs rouhlingeois des 17ème et 18ème siècles car non citoyens et non chrétiens, ils ne pouvaient pas figurer dans les registres paroissiaux ou d'État Civil locaux avant 1792.

C'était des pauvres gens dans le monde de paysans qui n'avait de considération que pour la propriété terrienne de laquelle les Juifs étaient précisément exclus et dans un monde chrétien où l'Église stigmatisait leur échéance comme étant le résultat de la punition infligée au peuple déicide.

Ils exerçaient tout d'abord de pauvres métiers : Colporteurs, chiffonniers… plus tard ils pénétrèrent le commerce intéressant le monde rural : marchands de grains, de fourrage, de bestiaux, de cochons, quincaillerie… A ROUHLING, les familles LEVY exerçaient les métiers de relieurs et de joueurs de violon.

La révolution Française avait levé dès 1791 l'anathème séculaire qui pesait sur Juifs, protestants et comédiens. Pour obtenir droits civils et politiques, les Juifs durent se rendre au Tribunal prêter serment et adopter un nom de leur choix et un prénom homologué ; ce que firent les Juifs de ROUHLING en se rendant le 20 octobre 1808 au " Amtsgericht " à SARREBRUCK où ils abandonnèrent leurs prénoms tels Beilen, Borig, Levy, Ruben, Salomon, Zerlen…

Le document relatif à cet événement nous permet de connaître avec précision la colonie juive de cette époque à savoir les 14 ménages suivants pour un total de 47 personnes.

Juifs Habitant Rouhling en 1808

CHEF DE FAMILLE ÉPOUSE NOMBRE D'ENFANTS

Simon KAUFFMANN Rosine THIEBAULT 1

Léopold MEYER Elisabeth LIEBMANN 3

Didier LEVY Charlotte RUBEN -

Simon LEVY - -

Louis BLOCH Barbara LIEBMANN 5

André BLOCH Dorothée DANIEL 3

Jean LEVY Ursule MEYER 4

Elie LEVY Agathe CREANGE 2

J. Pierre KAUFFMANN Nanette CREANGE 2

Benoît KAUFFMANN Sophie JACOB 3

Marguerite LIEBMANN - -

Lambert SELIGMANN - -

Marianne LEVY - -

Anna BLOCH - -

Le document comporte 23 signatures dont 18 en écriture hébraïque ; Élie LEVY et Lambert SELIGMANN signèrent en caractères latins, seules 3 femmes ne savaient pas écrire. Leur alphabétisation était en avance sur celle des autres rouhlingeois non juifs.

L'intellectuel du groupe était Lambert SELIGMANN, maître d'école et chantre (" Vorbeter "). Il habitait la maison supérieure de l'îlot qui se trouvait au milieu du village jusqu'en 1940 et que les anciens appelaient : " Mamber'sch alt Huss ". (Ce surnom, passé à la famille JUNG qui l'habitait après le départ des Juifs jusqu'en 1926 semble plutôt dû à Lambert JUNG (né en 1813, grand-père de feu, Mme Joseph SPOHR née Marie JUNG.)

Au cours de la 1ère moitié du 19ème siècle, les Juifs quittèrent progressivement ROUHLING pour s'installer à GROSBLIEDERSTROFF alors chef-lieu de canton. Leur départ semble dû à l'impossibilité d'avoir une école à ROUHLING.

De 1815 à 1833, il y eut 16 naissances, 7 décès, 4 mariages, enregistrés à l'État-Civil de Rouhling.

La dernière naissance : Mayer JUDAS fils de Jacques JUDAS et de Rechela LEVY le 5 juin 1833.

Le dernier mariage : entre Seligmann BLOCH, fils de Auser BLOCH et Dina LOEB et Blimela LEVY, fille de Elias LEVY, musicien et Agathe CREANGE ;

Les derniers décès : Hela LEVY (48 ans) fille de Moyse LEVY et Nanette CAEN, décédée le 28 septembre 1833 et Gwendelé ROBIN (88 ans) veuve de M. MAYER de Hellimer, décédée le 11/04/1833.

Le Cimetière Après leur départ, ils continuèrent à enterrer leurs morts dans le cimetière de ROUHLING. Les dernières inhumations étaient celles de Louise MENDEL, décédée à l'âge de 38 ans le 11 juillet 1878 et de G. BLOCH le 9 décembre 1883. A cette époque, le cimetière aurait nécessité un agrandissement mais le terrain avoisinant était jugé hors de prix par la communauté. Il fut donc abandonné et transféré à GROSBLIEDERSTROFF.

Ce n'était pas un mal car les enterrements à ROUHLING présentaient des inconvénients certains : le cercueil était porté à dos d'homme en montant la côte de GROSBLIEDERSTROFF, souvent sous les quolibets si ce n'est des jets de pierre de la jeunesse rouhlingeoise ; spectacle affligeant dans un village qui avait été une terre d'accueil pendant des siècles pour Juifs et protestants expulsés.

Aujourd'hui, ROUHLING a expié ces fautes en entretenant soigneusement le cimetière avec tout le respect dû à ceux qui y reposent.

Un magnifique chêne veille aujourd'hui sur leur repos éternel.

Nous leur disons : (lisez : SCHALOM) =>http://goo.gl/YhU9CU